lundi 5 juillet 2021

Bons Baisers de Thélème

Amis chers, gens beaux et heureux,

Do what thou wilt shall be the whole of the Law.

C'est le deuxième lundi après les feux de Litha et l'on vient de me demander :
Pourquoi avoir arrêté d'écrire sous l'abat-jour "wotaniste" ? Vous promulguiez tout aussi bien (Cf. Fais ce que voudras en 2009) et c'était plus AL I:10 dans l'esprit.
Ma foi, j'ai toujours considéré AL 1, 10 comme l'envoi en mission d'un agent secret, extrait de la collection Fleuve Noir...

Or un tel agent n'opère sous la fausse identité d'Igor Popov, Ukrainien parvenu, que le temps qu'il lui faut subir la proximité cheap de nos damnés amis d'Europe de l'Est (et séduire à tire-larigot leurs femmes aux regards d'épagneuls déçus) : son service accompli, il repasse l'Elbe, réintègre la civilisation et redevient, selon le cas, James Bond, Austin Powers ou Hubert Bonisseur de La Bath.

Vous me suivez ?...

NB : Il faut impérativement que quelqu'un se décide à écrire des romans d'espionnage thélémites : Bons Baisers de Boleskine, Céphalée à Cefalù – et, bien sûr, Le Caire, nid d'espions...

Amis chers, la Lecture de ce jour est le Liber Liberi vel Lapidis Lazuli Adumbratio Kabbalæ Ægyptorium sub figurâ VII, chapitre 4, versets 32 à 35.

32. O white cat, the sparks fly from Thy fur! Thou dost crackle with splitting the worlds.

Commentaire : Frater Orpheus dit de verset : < The amusements and pastimes of the god-head. >

A quoi s'amusent les dieux et comment passent-ils le temps ?

Le mot sparks nous renvoie à < ultimate sparks of the intimate fire > (AL 3, 67) : l'exégèse est le loisir des dieux.
                                                      
Comprenez : on distingue, dans l’étude des Livres Saints, le sens littéral (Pshat), le sens allusif ou symbolique (Remez), le sens herméneutique (Dirach) et le sens magique, mystique ou secret (Sod) – ces quatre parties formant, par acronyme, le mot Pardes פּרדס, « Paradis ».
                                               
Réintégrer le Paradis, c’est connaître les Quatre Sens.

Ra-hoor-khuit décrit cette méthode – ce système – ainsi : < Le sot lit ce Livre de la Loi et son commentaire, et n'y comprends rien. Qu'il subisse la première épreuve, et ce sera pour lui comme de l'argent. Puis la deuxième, et ce sera pour lui comme de l'or. Puis la troisième, et ce sera pour lui comme des pierres d'eau précieuse. Puis la quatrième, et ce sera pour lui comme les étincelles ultimes du feu intime. > (AL 3, 63-67)  
                                           
Bien sûr, le sens pur, le Cinquième Sens de la Parole Divine, n’est connu que de Hadit, l’Ancien Serpent, dieu de la Magie et de l’Extase, comme il est écrit : < ça, c'est pour les 4 : il y en a un cinquième qui est invisible, & et c'est là que je me trouve, comme un bébé dans un œuf  > (AL 2, 49).

L'exégèse consiste donc à décliner les Quatre Sens en tentant de s'approcher aussi près que possible du Cinquième, c'est-à-dire de l'Origine (bébé dans un œuf), c'est-à-dire de l'Un, c'est-à-dire de DIEU : < Dites que Lui DIEU est Un; DIEU est l’Éternel; Il n'a ni Égal, ni Fils, ni Compagnon; Rien ne tiendra devant Sa Face >, comme il est écrit (Ara 3, 0). L’exégète < traque [DIEU] à travers l'Univers avec l'appétit furieux d'une bête. > (LLL 1, 2)
                                                                                         
Or, si nous considérons que le Pshat concerne le Terrestre (man of Earth), que Remez concerne l’Amant, que Dirach et Sod concernent l’Hermite (AL 1, 40) – bref, qu’il s’agit, en commentant les Livres Saints, de faire en sorte que < le grossier passe à travers le feu, que le subtil soit éprouvé par l'intellect, et les superbes élus par le sommet >, comme il est écrit (AL 1, 49), nous pouvons même parler d’un « sens fumier » préalable, réservé au Trog, le < sot [qui] lit ce Livre de la Loi et son commentaire, et n'y comprends rien. > (AL 3, 63)
                                                                       
La célèbre parodie appelée « Livre des Beaux-Parents » (Book of the In-Laws) semble avoir été, au-delà du sarcasme, conçue pour « extraire », ou plutôt expulser, ce sens dernier, ou sens excrémentiel.
                                                                   
E.G : Lorsque le Trog lit : < Had ! la manifestation de Nuit > (AL 1, 1), il traduit : « Hi ! the manipulation of a Nut » (« Salut ! la manipulation d'un Cinglé ») , c’est-à-dire : « toute cette histoire de Cairo Working n’est qu’une escroquerie du  gourou psychopathe Aleister Crowley. »
               
Lorsque le Terrestre lit le même Verset, il déclare (Pshat) : « Il s'agit de la présentation des divinités principales du panthéon thélémite, i.e. Nuit, qui est une femme à la peau bleue, immense de taille et couverte d’étoiles, qu'elle avale parfois, mais qui ressortent plus tard – et Hadit, c'est-à-dire Horus en mode Soleil-de-Midi à feu vif : à moins que le réchauffement climatique ne soit votre marotte, restez sous la clim... » C'est < l'argent > du sens littéral (AL 3, 64).
                           
Lorsque l’Amant lit le même Verset, il en épluche les symboles, les valeurs numériques, les double-sens, et en déduit tout un tas d'analogies religieuses, philosophiques, éthiques, politiques, etc. (Remez) – c'est < l'or > du sens symbolique (AL 3, 65). 
 
Lorsque l’Hermite lit le même Verset, il commence par se plonger dans ce qu'en dit le Prophète (Dirach) – tant il sait de nature que < toute question relative à la Loi doit être décidée en regard de mes écrits, chacun pour soi-même >, comme il est écrit (Comment l.5) –, en l'occurrence :
« Nu étant 56 et Had 9, leur conjonction résulte en 65, Adonai, le Saint Ange Gardien. Adonai est en premier lieu solaire. Notez d'autre part que le manuscrit du Liber Legis a soixante-cinq pages. Ou, si nous comptons NV 56, Had 10, nous obtenons 66, qui est [la valeur mystique de 11]. Plus encore, Had est le centre du Mot-clé ABRAHADABRA. » (Ancien Commentaire)
Ou :
[Nuit et Hadit] sont le Tao et le Teh de la philosophie chinoise : ou, très simplement, le nom et le verbe en grammaire. Notre vérité centrale (au-delà de toutes philosophies) est que ces deux infinités ne peuvent exister séparément. Samuel bar Aiwaz les identifie à ANU et ADAD, les déités père et mère suprêmes des Sumériens. » (Nouveau Commentaire)
Ou encore:
« AL 1, 1 = Nuit définie. Nuit est tout ce qui peut être, et se montre au moyen de quiconque existe. » (Commentaire Djeridensis).
Ce sont < les pierres d'eau précieuse > de la Sagesse léguée par les Anciens   (AL 3, 66) .

Enfin, Sod: l'Hermite fait jaillir l’Arcane caché dans les profondeurs de la Parole – les < étincelles ultimes du feu intime > (AL 3, 67) par ex: « Nu = Nun-Vau, l'axe Scorpion-Taureau ; Had = He-Teth, l'axe Verseau-Lion: Ainsi, les Époux divins sont-ils constamment l'un-dans-l'autre et l'autre-dans-l'un: la nature de Hadit – Serpent qui dit < Me connaitre, c'est connaitre la mort > (AL 2, 6) (ATU XIII) et Sage entre les Sages (ATU V) – est résumée par le nom NU, et la nature de Nuit – Femme Idéale (ATU XVII), Saint Graal (ATU XI) qui dit  < Je suis le Ciel (Heaven) > (AL 1, 21) (on ne médite jamais assez le fait que quiconque soupire « I'm in Heaven », c'est-à-dire « J'ai réintégré le Paradis », proclame littéralement: « Je suis dans Nuit ») – la nature de Nuit, dis-je, est résumée par le Nom HaD. »

Il nous faut constamment garder à l’esprit que les Quatre Sens sont, à leurs plans respectifs, tout aussi vrais, justes, rigoureusement exacts, les uns que les autres, même, que dis-je ? surtout lorsqu’ils semblent antithétiques.

                                                                
Pour < ses amis restés dans la vallée >, le livre dont l’Adepte se < délecte > est réellement < inintelligible >, comme il est écrit (Por 15, 16).

Cela dit, en aucun cas la perspective inférieure ne peut atteindre à la Vérité, encore moins la compromettre, que les Heathen troglodytes nous soient hostiles (< Pourquoi ? Pourquoi ? babillent subitement un million de diablotins de l'enfer. Et leur fou-rire se communique à tous. Mais il ne contamine pas l'Univers ; mais il n’ébranle pas les étoiles > (LLL 2, 24-26)) ou qu'ils soient nos fans (< Accepte que te vénèrent les gens stupides, que tu détestes. Le feu n'est pas souillé par les autels des Guèbres, ni la lune contaminée par l'encens de ceux qui adorent la Reine de la Nuit. > (Cordis 5, 19))
                                                                                              
L’art consiste donc a éviter la « confusion des plans », i.e. l’application à un plan donné des considérations propres à un autre. C’est, du reste, l’art de la vie elle-même et la raison pour laquelle le Saint Tétragramme a Quatre Lettres.

33. I have seen more of Thee in the white cat than I saw in the Vision of Æons.

Commentaire : En fait de white cat, j'allais partir sur une étude exhaustive du symbole de la panthère des neiges.

Puis, je me suis rappelé que le cher Hunter Thompson, paix à son âme, en avait déjà tout dit lorsqu'il a déclaré :
Au sommet de la montagne, nous sommes tous des panthères des neiges.
34. In the boat of Ra did I travel, but I never found upon the visible Universe any being like unto Thee !


Commentaire : S'il y a une chose que < I am alone : there is no God where I am > (AL 2, 23) signifie, c'est que ce qui s'applique à la nature divine s'applique à mon ipséité.

C'est le thème inlassable du flocon de neige, de l'empreinte digitale et du synchronisme.

A ce sujet, j'écrivais autrefois :
« Principe de synchronisme », dis-je – or il me revient d'avoir découvert, au fil de correspondances récentes, que ce concept échappait encore à nombre de mes lecteurs – ce qui, au passage, me rend assez perplexe… Je veux dire : si vous n’avez pas totalement intégré les notions de Thélème et de « synchronisme », qui reviennent tous les deux paragraphes sur ce blog, qu’avez-vous bien pu imaginer que je racontais tout ce temps ??? 0_°
Il est aujourd'hui clairement établi que les lecteurs de Sir Shumule sont tous des génies et des canons – mais sans doute m’arrive-t-il d’être un peu obscur… Revoyons les fondamentaux.
Cher génie canon, c’est patriarcalement simple. « Thélème » (du grec θέλημα, « volonté irrépressible », « vrai vouloir ») signifie que vous possédez d’exceptionnelles capacités, qui sont absolument uniques. Vous êtes un chef-d’œuvre – et un chef d’œuvre différent de tout ce qui a jamais vécu dans l’histoire du monde.
Plus encore, les instructions précises dont vous avez besoin pour que votre génie se révèle existent de toute éternité – elles étaient déjà avec vous lorsque vous n'étiez pas une pensée coupable – en d’autres termes, vous avez un « code animique » – un code de l’âme – aussi rigoureusement personnel que votre code génétique. Vous pouvez l’appeler : la mission spéciale que vous êtes venu accomplir sur terre ; le blueprint divin qui contient le secret de la méthode pour être parfaitement vous-même ; le plan d’ensemble de ce que votre cœur désire par-dessus tout.
Il y a une énergie, une force vitale, une impulsion qui est, à travers vous, transformée en action. Et parce qu’il n’y a qu’un seul exemplaire de vous dans les siècles des siècles, cette expression est unique. Si vous la réprimez (ou laissez Choronzon – vos blessures d'égo – la réprimer), elle n’existera jamais plus par quelque autre médium que ce soit. Elle sera perdue pour le monde.
Tout l’art consiste, en quelque sorte, à traduire le message codé dans le génome de votre âme, et c’est ici que la notion de « synchronisme » intervient – le mystère des évènements « raccord » dans l’existence, de la perfection de l’univers, de la place de chaque être vivant comme partie intégrante et légitime de celui-ci – mystère sur lequel se base la divination, et qui faisait dire à Goethe: « tout est présage, tout est signe ».
Je connais un magicien qui peut trouver n’importe qui, dans une région qu’il n’a jamais visitée, en se guidant au vol et au chant des oiseaux. Tout ce qui vit est synchrone. En termes religieux, le seul Commandement de DIEU est que chacun d'entre nous accomplisse son Thélème – c’est votre inaliénable privilège de naissance que de pouvoir poser à DIEU la seule question qui importe, l’Énigme suprême, la grande QDSR cosmique, soit : « Que dois-je faire pour accomplir ma fonction universelle ? – A quelle fin me suis-je incarné ? – Quel est mon vrai vouloir ? » C’est aussi votre inaliénable privilège de naissance que de recevoir une réponse.
35. Thou wast like a winged white horse, and I raced Thee through eternity against the Lord of the Gods.


Commentaire : Frater Alion dit de ce verset : < Winged white horse – Pegasus >

Or Pégase, étant fils de Poséidon et de la Méduse, représente, selon le cas, l'imagination créatrice de l'entrepreneur qui, les pieds au niveau zéro de l'altitude, élabore son projet de conquète du monde (genre Bill Gates quand le siège social de Microsoft était une chambre de motel et Jeff Bezos quand le siège social d'Amazon était une petite chambre de motel), ou, inversement, l'égo qui s'emballe par surcompensation.

Ce que dit Pégase-fils-des-fureurs-de-Poséidon, c’est qu’il y a une étincelle divine, une sorte de folle énergie primale en nous. L’énergie est tout ce qui importe. Lorsque vous festoyez, vous produisez de l’énergie. Lorsque vous réfléchissez, vous produisez de l’énergie. Lorsque vous faites l’amour, vous produisez un énorme paquet d’énergie. Et la chose la plus triste de l’existence est la perte de cette énergie. Quelqu’un ou quelque chose meurt – c’est une perte d’énergie. Quelque chose s’arrête – votre voiture cale, et vous l’abandonnez sur une ère de repos de l’autoroute A8 – c’est une perte d’énergie – c’est Ragnarök.

Ce que dit Pégase-fils-de-la-pétrifiante-Méduse, c'est ce qu'un correspondant anonyme et compulsif shumulomane me demandait autrefois:
« Quel est ton but, à part te pignoler sur ton égo ? »
La réponse allait pourtant de soi : me pignoler sur Michelle Rodriguez !!! – Je note, de plus en plus, que les gens qui souffrent d’un manque de reconnaissance et d’attention, comme cet « anonyme » (qui n’avait pas signé ainsi par hasard : tout son problème est résumé dans sa signature), abusent du terme « ego », lequel est simplement, dans leur esprit, une façon de dire du mal de quelqu’un dont ils jalousent la personnalité (et la taille de [hum !] son « ego ») sans avoir l’air de ce qu’ils sont vraiment : des teckels pleurards en présence du Lion.


Pour ma part, je suis un monstre d'égotisme, mais n'ai jamais été égoïste.

Curieusement, si l’on prend le terme dans son sens spirituel, le sens que lui donnent les disciplines initiatiques, ce sont mes teckels anonymes qui sont rongés d’ego, c'est-à-dire d’hystérie personnelle se nourrissant de la conscience douloureuse de leur totale absence d’aucun talent, d’aucun charisme, d’aucun intérêt que ce soit – l’ego est bel et bien la chose du monde la mieux partagée – l’ego est le lot des « anonymes » – Psychologiquement, il se définit comme une structure érigée par un individu névrosé, issu d’une culture névrosée, contre la Loi de Thélème – Collectivement, la « culture occidentale » dont la « civilisation gréco-latine » pare le névrosé, afin de lui donner une contenance, est un accord tacite qui détermine quelles névroses sont socialement admissibles – Résultat : être « civilisé », être « romain », c’est avant tout accepter un certain degré d’aliénation.

Ce que méditant, allez, amis chers, sous la protection de cette sphère spirituelle dont le centre est partout et la circonférence nulle part et que nous appelons DIEU.

Belle journée à tous.

Love is the law, love under will.
 

- ☉︎ in 13° ♋︎ : ☽︎ in 22° ♉︎ : ☽︎ : Ⅴⅴⅰⅰ.