Pimp


Je reçois ce hate mail rigolo : 
« Avant de devenir le leader escroc obsédé sexuel d’une secte vénale dangereuse, à quoi vous destiniez-vous ? »
Ma foi, je ne me destinais à rien. Je m’amusais, c’est tout. Je jetais l’argent par les fenêtres et le regardais tomber. C’était très gai.

Mais puisque la chose vous intéresse, j'ai naguère résumé ma jeunesse ainsi : 
J’ai mené une existence d’aventurier dandy, impliquant une multitude de tampons sur mon passeport, de liaisons sans lendemain, de rixes sanglantes et de cellules de dégrisement. Il vous faudrait trois vies pour approcher ne serait-ce que le nombre de ragots qui me concernent […] J’ai aussi contemplé un tas de choses bizarres, dans presque tous les cercles où se pratiquent les arts du mysticisme et de la magie – choses à la vue desquelles un bourgeois, un sceptique, un matérialiste, se fût instantanément réfugié dans la certitude qu’il était atteint d’aliénation mentale – Moi, simple hobereau glandeur, il ne m’est jamais venu à l’idée de douter de mes sens – résultat : j’ai pu m’édifier tout en m’émerveillant. Pur produit de la Vieille France, c’est-à-dire jeune homme propre-sur-lui ayant appris très tôt que les enfants ne parlent pas à table, j’ai fréquenté plus de voleurs et d’assassins que si j’étais né cas social, et le lit de plus de femmes que si j’étais devenu hardeur – vocation que le cant familial contraria in extremis. J’ai beaucoup voyagé. Les convictions religieuses, philosophiques ou politiques ne valent rien, qu’elles ne soient validées par l’expérience directe – sans compter qu’en fait de femmes, j’aime livrer étranger – Mais je me sens devenir sédentaire – A l’homme véritablement contemplatif, ne suffit-il pas de changer, de temps à autre, l’agencement de ses coussins ?
Au plan professionnel, je m’en tiens à la Parole de Charles Baudelaire : < Il n'existe que trois êtres respectables : le prêtre, le guerrier, le poète. Savoir, tuer et créer. Les autres hommes sont taillables ou corvéables, faits pour l'écurie, c'est-à-dire pour exercer ce qu'on appelle des professions > (Mon cœur mis à nu, XXII).

Depuis la fin de mes études, je m’efforce d’être aussi inutile que possible, et n’ai jamais occupé le moindre emploi – sauf si vous considérez le proxénétisme comme un emploi... (NB : Il y a prescription. « Proxénétisme » est, d’ailleurs, en l'occurrence, un bien grand mot. Disons que j'ai vécu, un temps, avec une jeune femme qui, elle, vivait du commerce exclusif de ses charmes, industrie dont les dividendes étaient, en partie, consacrés à mon entretien... Mais l’expérience m’a paru hyper intéressante, parce que le proxénète est au sommet absolu de la chaîne alimentaire : lorsqu’un esclave a de l’ambition, il s’efforce d’accéder aux prébendes et aux sinécures ; puis il consacre ses émoluments à s’offrir de belles escortes ; lesquelles remettent ce qu’il leur donne à leurs souteneurs. Résultat : le baron de Rothschild n’est pas le final boss. C’est le pimp de sa croqueuse de diamants favorite qui l’est.)

Sur ce je suis las – Bons baisers du Château de La Touche, ami hater ! :D  – que votre Avent passe comme un rêve ! :D

- Sir Shumule, 3 décembre 2017